mardi 13 octobre 2009

Beaucoup de bruit pour rien

Mardi 29 septembre, Montréal fêtait la première de la pièce "Beaucoup de bruit pour rien" de W. Shakespeare au Théâtre du Nouveau Monde avec en vedette une comédienne a priori archi-connue puisqu'elle fait de la téloche (je dis "a priori" sans mauvais esprit car je ne suis pas encore assez familier avec le star-système québécois).

Me donner l'occasion d'assister à une représentation de cette pièce est très risqué.
Tout d’abord parce que je suis un addict complet de cette pièce et un vrai fan du film qu'en a fait Kenneth Brannagh avec Emma Thompson, Denzel Washington, Robert Sean Leonard et Kate Beckinsale (avant sa transformation "tiens j'ai plus du tout le même visage et j'ai des seins maintenant", merci docteur !).

Et ensuite parce que j’ai été très (trop) bien habitué aux interprétations de la troupe que je suivais lorsque j’étais a Toulouse (la vraie claque fut pendant Richard III, « Mon royaume pour un cheval !!!», inoubliable… en plus je n’avais vu ni le I, ni le II… blague archi-connue). Pour ceux qui sont dans le coin, Moulin de Roques, troupe du Grenier.

Le soir venu, mon billet en main, je rentre dans le théâtre parmi les premiers. Le bâtiment est magnifique, la vibration du théâtre est là (le tract des comédiens, les émotions des pièces précédentes, l’incarnation des grands personnages théâtraux, tout cela résonne…).

Un dernier regard sur mon billet et je remonte les rangs.
Oh ?! Je m'aperçois qu'on m'a assigné aux places de célibataires... Qu'est ce qu'une place de célibataire au théâtre, me direz-vous ? Vous voyez le tout premier rang ? Ok, maintenant tournez la tête à gauche, vous allez voir une rangée de trois places… et bien vous y êtes. La place de célibataire est la place bouche-trou complètement à gauche, celle qui est en général dévolue au pauvre type qui se tape une pièce tout seul, au critique ou au tas de manteaux des tourtereaux qui, eux, occupent les deux autres places de la rangée gauche.

A peine installé, arrivent mes sémillantes voisines.... deux mamies maquillées comme deux carrés d'as et embaumant l'eau de Cologne a un mètre a la ronde!!!

A tout ceux qui n'auraient pas partagé mon intimité (et vous ne savez pas ce que vous perdez...), sachez que je suis facilement allergique aux parfums, disons, tenaces...
Je vous laisse imaginer... des que les molécules aromatiques des deux momies (euh «mamies ») se sont répandues dans mes narines que mes yeux se voilent, mon nez me démangent et qu’une irrésistible envie d’éternuer se met à me tarauder...

Or le théâtre, c'est pas le cinéma (tu parles d’un scoop !!)... je m’explique, quand vous éternuez sur Schwarzenegger, il vous en veut pas, il n'arrête pas le film pour éponger le demi litre de postillon dont vous l'avez enduit... ben, au théâtre, c'est différent...

Voila donc que je me contorsionne pour me soustraire aux effluves "odoriplantes" (pardonnez le néologisme) qui m'agressent, mais rien à faire, je suis dans la zone dangereuse, je peux exploser dans un nuage de salive d’un moment a l’autre… J'use de toutes mes techniques de tortues ninja pour m'empêcher de respirer, le tout avec le plus de naturel possible.

Regard en coin de la momie la plus proche… à me voir me dandiner sur mon siège, je sens qu’elle va bientôt me conseiller une pommade anti-hémorroïdes avec un clin d’œil complice!!!

Tout à coup la lumière de la salle baisse et le silence se fait dans la salle.
Tonnerre d'applaudissement, la fameuse comédienne passe au travers du rideau pour le préambule de la pièce.

Et la je me permets de faire une ellipse salvatrice (pour vous).

Comment décrire mon état après, disons, les 4 premières minutes de la pièce?
Messieurs, avez vous déjà croisé une jeune femme magnifique au bras d'un vrai tocard ?
Une femme dont l'intelligence et l'humour vous laisse complètement foudroyé, ravagé mais qui s'est entichée d'un type aussi épais que grossier, ignorant complet de sa chance d’avoir une merveille accrochée à son bras ?
Et bien c'est un peu mon état après avoir vu la pièce...

La belle = la pièce, le texte
Le balourd = le metteur en scène.

Je pense que le parti pris du neuneu qui a servi de metteur en scène a été d'essayer de faire jouer cette pièce par des notaires.
Impossible de déceler plus d'une intention dans chaque tirade!!
Trop complique.
Adieu la finesse, adieu le beau discours, adieu le badinage de Beatrice et Benedict.... le texte est servi au premier degré, sans passion, les comédiens ne se parlent même pas, ils se contentent de réciter leur texte face au public...
Même les effets comiques, réduits au premier degré, deviennent lourdingues... (Sans parler de l’acteur incarnant Benedict qui cabotine au lieu de jouer avec sa partenaire).
On nous sert un Shakespeare surgelé et décongelé au micro-onde... la structure est la, le texte est la mais le feu n'y est plus.... je n'ai même plus envie d'éternuer !!!

Le prochain qui me joue du Shakespeare comme on récite sa liste d'epicerie, je le brise... je prends son petit corps et je l'émiette, je le pulvérise, je l'écrase, je récupère les bouts, je les brule et je jette les cendres dans les toilettes... c'est compris ?!?!

Shakespeare c'est l'amour, la haine, la vengeance, la passion, la mort... rien à voir avec le devis de chauffagiste que j'ai eu ce soir la...

Le plus frustrant : a la sortie, nous sommes sollicités pour donner notre avis... je me précipite, (prétentieusement) convaincu que mon avis pourra éveiller le metteur en scène mais on m'explique mon avis ne peut être donné qu'au travers de cartons où sont dessinés des masques tristes ou heureux....
Aucun moyen d'expliquer les raisons de son mécontentement... il faut être « très content », « content », « satisfait », « peu satisfait », « déçu », « irrité » mais en aucun cas expliquer les raisons de ton état d’âme…

Je me résigne donc à garder ma frustration pour vous qui avez la patience de me lire...
merci à vous ! (salut de théâtre)

2 commentaires:

Baptiste a dit…

Comme quoi le parfum d'une momie peut énerver autant qu'un Allemand qui mange un paquet de M&M's pendant "The Aviator"... :-)

Phil a dit…

En fait je pense que ton allemand etait pire a supporter parce que toi, tu etais captivé par le film.
Perso, la mise en scene etait si naze que j'etais a deux doigts de draguer l'ancetre...